GEORGES DUREAU PIONNIER DE LA PHOTOGRAPHIE DE NU MASCULIN BLACK

GEORGES DUREAU PIONNIER DE LA PHOTOGRAPHIE DE NU MASCULIN BLACK

Enfin un beau livre « The photographs » publié par Aperture Foundation (NY) vient apporter une lumière internationale au travail photographique de l’artiste gay, Georges Dureau, né et mort en 2014 à 84 ans à la Nouvelle-Orléans. Le livre compile les grands portraits de nus masculins réalisés pendant quarante ans par ce peintre, sculpteur et photographe qui célèbre sa passion esthétique et baroque pour les gens de la rue ou les personnes mutilées et déformées rencontrées tout au long de sa longue romance avec la Nouvelle-Orléans.

Par Christophe Demoulin

Souvent comparé au travail de Robert Mapplethorpe qui était son ami et son admirateur, les nus masculins noirs de Dureau en particulier sa série « Black 1973 – 1986 » précèdent de plusieurs années les portraits du « Black Book » du photographe New-Yorkais Mapplethorpe publié en 1986 qui le consacreront comme le pionnier de la photographie de nu masculin moderne, qualifiée d’homoérotique. 

Georges Dureau estné en 1930 en Louisiane. Il commence à dessiner très jeune, étudie l’architecture mais est vite pris par la vie décadente du «French Quarter» le quartier français de la Nouvelle-Orléans où il habitera toute sa vie. Dureau a une personnalité flamboyante, amoureux de la nuit, il est vite connu pour les soirées qu’il organise et ses excès. C’est parmi ses amis et en parcourant la ville en bicyclette qu’il rencontre ses modèles et amants. Mais jamais Dureau ne semble prendre sérieusement la photographie considérant celle-ci comme une méthode de recherche pour ses peintures. Il n’aura pas vraiment d’appareil photo jusqu’au début des années 70 où il commencera à utiliser un Hasselblad. 

Le style de Dureau repose sur une mise en scène minimale d’hommes nus pris dans des poses gréco-romaines classiques, d’apollons sans bras et parfois sans jambes, d’hommes troncs qu’il présente la plupart du temps comme des statues cassées. Dureau a aussi une fascination pour les handicapés et les nains.

Ce qui caractérise ses images c’est l’humanisme qui s’en dégage. Il a de l’empathie pour ses modèles, il montre leur personnalité, leur force, leur dignité, mais aussi leur vulnérabilité. Toute sa vie, il gardera contact avec ces hommes de la rue en leur offrant le gite, de la nourriture et aussi de quoi payer leurs factures. 

Il faut mettre en perspective ce travail photographique avec la mentalité de la fin des années soixante aux Etats-Unis ou être gay constituait un délit de « criminal offence » puni d’emprisonnement, surtout dans cette ville ségrégationniste de la Nouvelle-Orléans qui fut la capitale de la traite et de l’esclavage des Noirs. L’engagement du travail de George Dureau est total et va plus loin que le regard sur la nudité… L’artiste gay est jusqu’au-boutiste, il n’aura de cesse de braver les interdits, la loi, la ségrégation et il faudra avoir attendu sa disparition pour découvrir cette œuvre majeure par sa pureté avant-gardiste.